Rêver large de François Gabart

francois gabart

Il y a quelques mois, je m’étais procurée cette biographie de François Gabart, marin-ingénieur qui a gagné le Vendée Globe à seulement  27 ans ! Je suis allée il y a quelques semaines sur le village du départ de la Transat Jacques Vabre au Havre où j’ai pu rencontré des skippers et visiter leurs bateaux. Ce fut une expérience incroyable. Pour continuer l’immersion, j’ai donc ressorti de ma pile à lire ce livre pour mieux comprendre l’univers de la voile.

Idée reçue : pour moi François Gabart, c’est le mari idéal. Beau, blond, yeux bleus, carrure sportive,  ingénieur, motivé et bien éduqué. Il est d’ailleurs lui-même victime de son image BCBG.

« Je fais assez gendre idéal ou fils de famille. D’ailleurs j’ai plutôt la cote auprès des belles-mères et des grands-mères ! Je sais bien qu’on apprécie ma bonne éducation et ma manière de tenir la porte aux dames et aux… hommes pour éviter qu’ils ne se la prennent sur le nez. J’admets que mon itinéraire scolaire et mes diplômes d’ingénieur doivent rassurer un pays qu’angoissent les fièvres de sa jeunesse décrocheuse et les refus de sa périphérie de se laisser pousser dehors. Il ne faudrait quand même pas m’imaginer en enfant de choeur à qui donner le bon Dieu sans confession. »

J’ai découvert à travers cette lecture un homme très organisé. Tout est calculé et ses projets sont sa motivation principale. La voile passe avant tout. Gabart est un compétiteur né. Sur une course, il n’y a plus de pitié. Il préfère même ne rien communiquer à ses équipes sur terre pour être certain qu’aucune information compromettante ne sera divulguée aux adversaires. Lors de la Route du Rhum en 2014, course en solitaire, Gabart se retrouve avec un spi déchiré mais préfère ne rien dire pour ne pas inquiéter ses équipes et surtout pour ne pas montrer de point faible dans la compétition.

« Je n’ai plus de grand spi, alors que les conditions à venir l’exigent. Je ne dis rien de tout ça. Je ne préviens que Tiphaine et Antoine, mes plus proches seconds à terre. Il ne faut surtout pas donner d’informations à l’adversaire, qui pourrait en profiter pour m’entrainer dans des options météo où l’usage de ce spi que lui a gardé intact serait décisif. Il me faut aussi croiser les doigts pour que le vent ne mollisse pas et qu’il ne tourne pas. Pour l’instant, le spi perdu ne me manque pas. Afin de creuser mon avance, avant l’arrivée sur les Antilles, je tape dans les réserves. Je barre sans cesse. Je ne dors plus. »

Gabart est un combattant, un acharné de la voile. Tout excursion en mer est bonne à faire. Il faut dire qu’il est tombé dans ce milieu petit. A l’âge de 6 ans, ses parents décident de prendre une année sabbatique et de l’emmener avec ses deux soeurs à travers l’Atlantique sur un voilier. Cette année a confirmé son amour pour la vitesse et les sports de glisse. Bien qu’il soit habitué à traverser les océans en long et en large, François Gabart n’apprécie pas la natation ou la plongée. Il n’est clairement pas un poisson dans l’eau.

Suite à cette expérience de la croisière à la voile grâce à ses parents, il s’inscrit dans les compétitions d’Optimist et de Moth pendant ses années collège-lycée, puis Tornado (catamaran) pendant ses études puis commence sa carrière professionnelle en Imoca (monocoque) et aujourd’hui il navigue en Ultim (trimaran).

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Victoire au Vendée Globe 2013

« Prendre une année sabbatique ? Partir en voilier faire le tour de l’Atlantique ? En camping-car vers les extrémités orientales de l’Europe ? Avec un sac à dos dans les vallées du Népal ou les îles asiatiques ? Beaucoup de gens en rêvent vaguement. Quelques-uns réussirent à concrétiser leurs projets d’escapade. Nombreux sont ceux qui y renoncent, restent au coin du feu de leurs habitudes. Peut-être, tout simplement, préfèrent-ils ne pas faire aboutir les choses, pour continuer à osciller entre mélancolie de l’inaccompli et déroute de la volonté.
Je suis assez admiratif de mes parents. Ils avaient envie d’y aller et ont passé outre aux réticences, celles de leurs proches, de leurs collègues, de la société routinière, conformiste et confortable. Ils ne le racontent pas comme une expédition extraordinaire, ni comme une transgression agressive. Ils s’en souviennent comme d’un temps heureux volé à la répétition des heures, comme d’un décentrement agréable de la cellule familiale. A l’époque, je n’avais pas une seconde la sensation d’effectuer un voyage exceptionnel, ni d’ouvrir les yeux sur un monde nouveau. Aujourd’hui, je les remercie d’avoir pu vivre cette aventure miniature en leur compagnie. »

Faire de la voile son métier, l’amène à être chef de projet. Il doit choisir ses équipes, trouver les investissements, construire et innover le bateau. Pour ça, il est très bon en communication et bon négociateur. Mais c’est aussi un touche-à-tout qui a besoin de tout comprendre sur son bateau.

Surprise au première abord par l’écriture plutôt haché « sujet + verbe + complément », je m’y suis finalement habituée, et le besoin d’être concis et direct correspond tout à fait au personnage. J’ai apprécié découvrir comment nait une passion, comment on peut vivre de son rêve. Je le pensais humble avant de lire ce livre mais il est plutôt très sûr de lui. Il ne vit pas les courses comme une aventure humaine avec les autres compétiteurs. Si je l’ai trouvé moins amical que dans mon idéal, il faut tout de même admirer son talent pour la voile et la connaissance de ses équipements.

Même s’il a un sacré caractère et est souvent absent, je pourrai faire un effort s’il souhaite être mon compagnon… Aucun commentaire reçu du principal concerné.

Une très bonne lecture !

Pour info, François Gabart navigue toujours sur Macif. Il est actuellement à bord d’un Ultim effectuant la Brest-Atlantique ralliant Brest, Rio de Janeiro et le Cap.

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